place espoir (ciel)

Toujours cette même allure, celle négligée et oubliée, celle qui traîne du pied, celle qui courbe sa nuque tandis que ses prunelles se concentrent sur le bitume de la ville. Gamin qui avait toujours la tête en l’air, fut un temps. À flirter avec les cieux que la maladresse le rattrapait, le faisait presque chuter sur d’autres silhouettes. Désormais, c’est les Enfers qu’il observe avec intérêt. C’est là que vont les maudits, d’après lui. Ceux qui méritent de brûler sous la colère de l’éternel maléfique, ceux qui amènent l’Enfer sur terre alors que la vie les renie. Il sait l’autre dans les cieux, à flirter avec cette éternité, mais la peur se fait de plus en plus grande à l’idée qu’ils ne se rejoindront jamais. Effrayé à l’idée de croupir sous le sol des mortels, mère qui a sûrement du prier pour lui avant même qu’elle ne donne la vie, père qui allait à l’église en pensant à cette femme et à ce fils rescapé alors que la faucheuse leur courrait après. Les croyances qui s’atténuent, les prières qui se font rares, mais les mêmes détracteurs qui l’effraient alors que ceux-ci lui font peur depuis sa tendre enfance. Enfant de l’église, garçon solaire, lui qui a toujours redouté les dires sur ces enfers, sur le mal. Finalement, peut-être que cette peur s’enfuira lorsqu’il se fera à l’idée. Les pensées qui lui soufflent que sa place est déjà réservée, là-bas, plus bas qu’ici-bas. Pensées qui divaguent encore une fois, celles qu’il ne peut plus tenir en laisse, celles qui partent et qui lui font échapper un soupir de désespoir. Il aimerait pouvoir penser aux bêtises de la vie comme il le faisait autrefois, s’amuser de la beauté des rues, des sourires anonymes, des âmes vagabondes le saluant, des marchands exténués et des cyclistes pressés. Il aimerait s’extasier du mouvement et de la vie, mais Ocean se morfond dans ses idées morbides. Pourtant, il sait qu’il doit se reprendre. Il ne peut rentrer dans le cinéma, rejoindre son rendez-vous du jour avec cette tête de déterré et ses pensées sombres qui se font beaucoup trop intrusives. Ocean qui promet de redonner une image de lui qui n’est pas celle qu’il affichait quelques mois auparavant, Ocean qui fait ses promesses en secret comme ça personne ne pourra lui reprocher de ne pas les avoir tenus. Seulement, il refuse de donner cela à Ciel : de donner cette image déprimante de sa personne, lui qui l’a connu dans son extase, dans ses plus beaux jours avec la troupe. En retour officiel, il se refuse de débarquer avec cette moue triste. Alors, il relève la tête quelques rues avant d’atteindre le cinéma de ville. Tête relevée et faux sourire arboré, le souffle qui franchit ses lèvres comme un mot d’encouragement envers sa propre personne. Une sorte de tu peux le faire secret que lui seul peut comprendre dans cette absence de mots. Les prunelles qui se perdent vers les nuages et le ciel caché par la grisaille, la grimace envoyée à celui-ci comme un message au bouclé qui le surveille sûrement. La promesse faite au fantôme comme pour lui dire qu’il se doit de reprendre les choses en main, qu’il n’abandonnera pas ce qu’ils ont commencé. Il attend devant le bâtiment normalement fermé, celui-ci qui n’affiche pas les plus grands titres et qui fait office de divertissement enrichissant pour les âmes ennuyées du coin. La hâte de voir la chevelure du gamin se montrer enfin, une sorte de retrouvailles après une absence radio de quelques semaines, lui qui était tenu informé malgré tout. Ocean fantôme, la présence qui varie de semaines en semaines. L’ombre qu’on espère croiser, mais qui se faisait invisible, lui qui décide de sortir de celle-ci parce qu’il a trop traîné. Au final, Ocean défie ses Enfers en admettant bientôt haut et fort qu’il retrouver sa vie. Prêt à se battre, certes, mais pour combien de temps ?
@Ciel Byrne